Puisque je ne suis que la mer,
Cet agitateur éphémère,
Rêveur moucheté, je m'échoue
Toujours sur les mêmes récifs.
Parce que tu n'es que le vent,
Ce grand voyageur permanent,
Et tu souffles ma longue joue
Toujours sur les mêmes récifs.
Mes rêves, me demandes-tu ?
Ah mes rêves, mes rêves...
Mes rêves, tu les connais,
Tu les as vu, les as sentis,
Ils sont là, au creux de mes mots,
Serpentant sous les uns,
Voltigeant sur les autres,
Ils s'agitent sans répit.
Revenir,
T'emmener,
Prendre ta main,
Prendre la route,
Prendre le temps,
Le temps de s'émerveiller,
De contempler ensemble,
De découvrir ensemble,
De prendre ensemble,
Ou ce qu'on appelle comprendre.
Voyager, et cueillir,
Cueillir la vie,
S'offrir le choix
De décider de chaque jour,
Ou bien de se laisser porter
Par un destin qui nous échappe.
Se frayer un chemin
Dans le fouillis des broussailles,
Découvrir l'oiseau sous les fougères,
Répondre à l'appel du ruisseau,
S'abbreuver de sa calme magie,
Avancer sous les ombres chinoises
Des feuilles balancées par le vent,
S'ouvrir et laisser s'engouffrer
En nous un peu d'éternité.
Porter des fleurs à tes cheveux,
De l'eau à ton moulin,
Effeuiller ton âme,
Et t'en exposer la beauté,
Pendant que tu te promènes
Dans la mienne
Et la réchauffe
De tes mains.
Voir scintiller le monde
Comme scintillent les lacs ensoleillés,
Rebondir de lumière en lumière,
Puis poser un genoux à terre,
Et rayonner enfin.
Je le voulus plus grand, plus beau plus fort
Je l'esquissai de mon doigt dans les nuages,
Les yeux plus gros que le cœur,
Le cœur trop loin de tes yeux.
A quoi sert tout cela ?
A rien, mon ami,
A rien.
Puisque je ne suis que la mer,
Cet agitateur éphémère,
Rêveur moucheté, je m'échoue
Toujours sur les mêmes récifs.
Parce que tu n'es que le vent,
Ce grand voyageur permanent,
Et tu souffles ma longue joue
Toujours sur les mêmes récifs.
